Ce qui peut paraître étonnant, c'est la motivation de cette prudence: «Car Dieu est dans les cieux eu toi tu es sur la terre; pour cela que tes paroles soient peu nombreuses» (V, 1b) et sa correspondance: «Ne permets pas à ta bouche de faire pêcher ta chair» (V, 5a). Ainsi, la parole est immédiatement mise en relation avec Dieu. Tout usage de la parole est un reflet du mode d'action de Dieu: la parole, reflet de cette révélation que Dieu est parole. Mais ce Dieu est inconnaisable. Toi, sur la terre, sois donc prudent lorsque tu mets en jeu une relation avec lui, un voeu, ou même pas: ta parole, pas forcément prière, simplement parole même adressée à ton prochain, c'est toujours une mise en jeu de Dieu par l'usage de cette création étonnante qu'est la parole, qui est don de Dieu. D'où l'apparition du «péché» à cette occasion. La seule. Tout este vanité, folie, néant, mais une seule chose péché: l'abus de la parole!
Comment ne pas retrouver ces mêmes recommandations, de la part de Jésus, qui semblerait s'être inspiré de ce texte: «Lorsque vous priez, ne multipliez pas les vaines redites, les paroles inutiles comme les paiens qui s'imaginent qu'à force de paroles, ils seront exaucés» (Mat VI, 7). Jésus montre toujours la plus grande sobriété dans tout ce qu'il dit. Et réciproquement, il nous montre que la simple parole engage tout l'être! «Il suffit de dire: Raca! à son frère pour mériter d'être passé par le feu de la géhenne» (Mat V, 22). La parole est aussi décisive pour Jésus que pour l'Ecclésiaste. Décisive et décisoire. Car la parole est finalement plus efficace que l'action! Elle entraîne des effets considérables.
Rappelons: «Les paroles des sages dites avec calme sont plus écoutées que les cris d'un chef au millieu des insensés» (IX, 17).»
Jacques Ellul, La Raison d'être, Méditation sur l'Ecclésiaste
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